De David Lacombled et Maryam Salehi sur lesechos.fr
Ces temps-ci, un certain nombre de nos concitoyens, gagnés par la tentation du repli identitaire, expriment leur nostalgie d'un temps où la France rayonnait dans le monde entier. C'était le temps, selon eux, où la France fascinait dans toute sa pureté. Aujourd'hui, nous ne serions plus qu'un pays amoindri dans ses ambitions, bafoué et moqué par le « french bashing ».
Nous voudrions rassurer ces concitoyens inquiets : la France rayonne encore et toujours, et son esprit est bel et bien vivant. Ce rayonnement et cet esprit portent même un nom hors de nos frontières, comme la marque de fabrique d'un esprit français toujours en éveil : c'est la French Touch. La touche française.
Qu'il s'agisse des deux prix Nobel tout récents de Patrick Modiano et de Jean Tirole, du triomphe absolu et planétaire des Daft Punk et leur couronnement aux Grammy Awards, de « The Artist » ou de Marion Cotillard, qui ont raflé les plus beaux oscars, des succès internationaux comme « Intouchables », mais aussi « La Vie d'Adèle » ou « Qu'est-ce qu'on a fait au bon Dieu ? », des séries comme « Les Revenants » couronnés en Angleterre, de nos chefs étoilés qui brillent dans le monde, comme Hélène Darroze ou Alain Ducasse, des architectes, comme Jean Nouvel, Christian de Portzamparc, des designers comme Philippe Starck, Ora Ito ou Jean-Marie Massaud, sans compter le luxe avec les « condottieri » internationaux que sont Bernard Arnault et François Pinault, mais aussi toute la nouvelle garde hexagonale de la French Tech… On pourrait encore citer la plasticienne Camille Henrot ou le danseur et chorégraphe Benjamin Millepied. Les raisons de se réjouir d'un rayonnement français sont nombreuses. La French Touch, c'est le nouveau panache français. La force de ce panache, c'est l'esprit français, riche de sa langue et de ses valeurs, qui transcende ces considérations idéologiques pour se porter et s'exporter à travers le monde.
Préserver notre culture et notre industrie culturelle est primordial, essentiel, vital. Mais la question est de savoir ce que l'on cherche à préserver ? Notre langue ? Notre originalité ? Oui, évidemment, mais pas comme un patrimoine fermé et forcément en péril. C'est surtout l'esprit de panache qu'il faut préserver, non pas en dressant la barrière de la langue telle une ligne Maginot, mais en le faisant briller, avec fierté, à l'extérieur. L'exception culturelle n'est pas seulement une question de lettre, mais c'est aussi et surtout une question d'esprit. Et l'exception culturelle française gagne en exerçant son influence pour se commuer en une exception universelle. Lorsque Jean Nouvel « construit » le musée des Arts de la Chine à Pékin, il le conçoit comme un fragment d'idéogramme. Lorsque les Daft Punk veulent faire danser la planète entière, ils s'inspirent des hymnes des « dance floors » mondiaux. Lorsque Michel Hazavinicius veut rendre hommage au cinéma muet, il s'inspire d'Hollywood. Mais chacun à sa façon, le fait avec ce panache purement français.
Et puis cet esprit français est ouvert sur sa propre diversité. Et malgré ce que peuvent en dire nos déclinistes, cela a toujours été le cas. Qui représentait la quintessence du charme français dans les années 1950 aux Etats-Unis ? C'était Yves Montand, alias Ivo Livi, d'origine italienne. Et qui incarne une des légendes de la chanson française ? C'est Chahnour Vaghinag Aznavourian, mondialement connu sous le nom de Charles Aznavour. Et que, aujourd'hui, des films comme « Intouchables » ou même « Qu'est-ce qu'on a fait au bon Dieu ? » fassent triompher le savoir-faire français hors de nos frontières montre à quel point l'ouverture d'esprit est dans l'ADN de notre culture. Nous avons la ferme conviction que ce n'est pas en cherchant une hypothétique « pureté » que nous répandrons l'esprit français, mais au contraire en ralliant à notre panache français toutes ses différences et ses richesses.
David Lacombled est président de l'IAB France et Maryam Salehi est directrice déléguée à la direction générale de NRJ Group